Les lampes de Longpont
Sur le grand portail, on ne trouve pas de représentation du jugement dernier. Ici pas bête terrible qui rend ses morts avant de les juger comme à Saint Basile d’Etampes ni de monstre à la gueule grande ouverte pour engloutir les damnés comme à St Sulpice de Favières. À Longpont, le tympan du portail est consacré à la glorification de Marie.
Pourtant, au bas de l’archivolte extérieure du grand portail, on reconnaît deux arbres aux allures bien différentes. L’un est tellement sec qu’une hache s’apprête déjà à lui régler son compte. L’autre est si touffu qu’il ressemble à un chou-fleur prolifique.
Au-dessus de chacun de ces arbres symboliques, figurent deux séries de 5 personnages féminins. Celles de droite, au-dessus de l’arbre sec, portent avec dépit un vase renversé, comme pour bien signifier qu’il est vide. Certaines d’entre elles ont pourtant une couronne sur la tête mais leur vase est vide. Pire, on distingue encore l’huile qui se renverse désespérément de plusieurs vases. Elles ont gâché le précieux trésor.
Au contraire, celles de gauche, au-dessus de l’arbre touffu, portent chacune leur vase à l’endroit. Par contraste, on comprend qu’elles tiennent des vases bien remplis.
C’est la parabole des vierges folles et des vierges sages qui est illustrée sur le portail de la basilique.
C’est une sorte d’avertissement aux pèlerins d’hier et d'aujourd'hui qui franchissent le portail. Prends garde à ton vase d’huile pour tenir tout au long de la longue route de la vie ! Dans toutes les joies et toutes les épreuves, dans le quotidien qui tisse ta vie, tiens ta lampe allumée ! Remplis ici ton cœur de foi, d’espérance et d’amour.
Sur le portail de Longpont, comme dans la parabole de l’Évangile, ce n’est pas une représentation figée de l’état du monde qui est proposée à nos yeux. Il n’y a pas les sages d’un côté et les fous de l’autre, les indéfectibles croyants et les infidèles définitifs. Il n’y a pas ici les damnés et les élus. Cette scène représentée dans la pierre est plutôt un appel pour le temps de la route : il appartient à chacun de remplir son vase d’huile. Tant que l’on franchit la grande porte, tout est possible. Il n’est jamais trop tard, tous les cœurs peuvent s’ouvrir.
Un sanctuaire est toujours un lieu source.
Ici c’est Notre Dame de Bonne-Garde qui guide les bonnes volontés. La Vierge Marie veut, par la grâce du Christ, que chacun reparte de Longpont avec son vase plus rempli.
Père Frédéric Gatineau
Juin 2011