Juge ou jugé ?
La sainte Écriture n’est pas un ensemble bien cohérent. Ceux qui veulent y chercher un corpus de doctrine clair et sans faille sont souvent bien surpris et ceux qui veulent y trouver une morale sans équivoque restent toujours sur leur faim. Aujourd’hui, pour fêter la Sainte Trinité, l’Évangile de St Jean nous dit que le Fils n’est pas envoyé pour juger le monde et pourtant ailleurs, dans le même Évangile, on nous dit que « le Père a donné au Fils tout pouvoir de juger » (Jn 5 22).
On se souvient aussi que Jésus a souvent dit qu’il ne faut pas juger. Il ne faut pas juger non seulement parce que ce n’est pas très joli de dénoncer ses camarades, ni même parce que, avec un peu de lucidité, on sait bien qu’on ignore beaucoup du secret des histoires, des consciences et des fragilités de chacun. On ne peut fondamentalement juger parce que le Christ aujourd’hui ne juge pas. Les « juges du monde » il y en a plein les journaux, plein les télés et plein les radios. Même sur les réseaux sociaux on juge, on "like" ou on déteste. On prend comme ami ou on dégage sans autre forme de procès selon un mode binaire et donc assez primaire. Les écrans deviennent une sorte de télésurveillance généralisée. Quand on est du bon côté du clavier, on se croit hors d’atteinte du jugement puisqu'on juge.
Jésus le Fils n'est pas venu pour juger mais pour sauver. Connaître la Trinité Sainte, ce n'est pas avoir la radiographie du mystère de Dieu. Ce n’est pas un écran de plus pour nos curiosités voyeurs. Le mystère de la Trinité nous est connu, non pas d’abord comme savante mais comme « sauvante ». Nous connaissons la Sainte Trinité par Jésus qui est le Fils venu sauver. En sauvant, le Fils révèle le Père et envoie l’Esprit. La Trinité, c’est Dieu à l’œuvre pour notre Salut. Le Père envoie le Fils, le Fils et le Père envoient leur commun Esprit pour achever toute « sanctification ». Avec le Christ, aujourd’hui, ne jugeons pas ! Sauvons !
Père Frédéric Gatineau
Juillet 2015